illustrateur
Jules Canoué

Il ne reste que quelques minutes avant que Kolossoff ne fasse son entrée sur la scène de la Philharmonie de Saint-Pétersbourg. Dans la salle, le public, impatient, attend le musicien virtuose et son interprétation de la “Sonate n° 7 en si bémol majeur, opus 83” de Sergueï Prokofiev. Le trac gagne insidieusement le pianiste qui, à l’approche du lever de rideau, opère sa métamorphose. La nervosité déforme son corps imposant quand, dans son esprit, les flux de conscience se bousculent. Allegro inquieto.

Extrait

Je fumai en scrutant mes yeux dans le miroir pour voir le reflet de mon reflet dans le brillant de mes pupilles. Ce reflet dans le reflet sera plus tard la musique qui sortira de mes doigts. La transformation opérait. À quelques minutes de la performance, je n’étais déjà plus le même Kolossoff. Je m’étais préparé à cette mutation depuis le petit matin. Je n’avais parlé à personne, je n’avais pas vraiment vécu.

Kolossoff est une nouvelle inédite.
© Feuilleton, 2013