Vive le hockey libre !

illustrateur
Ruth Gwily
Vive le hockey libre !

Sport national, langue commune, le hockey sur glace passionne les Canadiens. À compter des années 1960, ce sport joua aussi un rôle politique essentiel pour la minorité francophone déconsidérée. L’équipe mythique des Canadiens de Montréal incarna durant vingt ans ce combat : leurs victoires préfigurèrent et accompagnèrent la “révolution tranquille” de la société québécoise francophone.

Début août, un mercredi soir de canicule à Montréal. Vingt-huit degrés malgré le soleil couchant. En mettant le pied dans l’aréna, la différence de température saisit – c’est comme entrer dans un réfrigérateur. Au-dessus de la glace lisse flotte un léger brouillard.

Dans le vestiaire, en lançant blagues et railleries, mes coéquipiers troquent leur short et leurs sandales pour les sous-vêtements longs et les multiples pièces d’équipement du joueur de hockey. Mais tout en prenant part à la gaminerie générale, chacun tente silencieusement de se concentrer sur le match à venir : regarde avant de passer, fonce au but plus souvent, garde la tête haute. La fébrilité qui nous a habités toute la journée va bientôt s’extérioriser dans un tourbillon de corps en mouvement, de couleurs, de cris, de chocs.

Nous pourrions avoir huit ans, l’histoire serait la même, les émotions identiques. Mais nous en avons trente, quarante, cinquante, et formons un mélange hétéroclite de professions, de classes sociales, de conditions physiques.