Les os de la discorde

auteur
Paige Williams
traducteur
Jérôme Orsoni
Les os de la discorde

Il y a environ soixante-dix millions d’années, un dinosaure, le Tarbosaurus bataar, vivait dans la région de l’actuel désert de Gobi, en Mongolie. En raison de la rareté du spécimen, la présentation d’ossements appartenant à l’espèce lors d’une vente aux enchères à New York ne manqua pas d’attiser convoitises et soupçons. Un mandat d’arrêt fut lancé contre le squelette fossilisé, placé, malgré lui, au centre d’une controverse qui agita les paléontologues, chasseurs d’os et les États américain et mongol eux-mêmes. Paige Williams a mené l’enquête.

Aux États-Unis, l’histoire naturelle est mise aux enchères cinq ou six fois par an. Un dimanche de mai 2012, une grande vente s’est tenue au Dia Center for the Arts de Chelsea, qui l’accueillait pour l’occasion. La vente, organisée par une entreprise du nom de Heritage Auctions, s’est ouverte sur deux géodes d’améthyste qui ressemblaient aux oreilles d’un lapin sur le qui-vive. Puis, des météorites, du bois pétrifié, des défenses d’éléphant ; des mille-pattes, des scorpions et des araignées préservés dans de l’ambre ; des quartz précieux, des cristaux et des fossiles. Les fossiles allaient de petits animaux aquatiques de l’Éocène incrustés dans de la pierre à des restes de dinosaures de la fin du Crétacé. Ce jour-là, l’orteil articulé et la griffe d’un dinosaure marocain ont été vendus à soixante-trois mille dollars et la dent d’un tyrannosaure – vingt-sept centimètres de la racine à la pointe – à presque quarante mille.

Bones of contention a été traduit de l’anglais (États-Unis) par Jérôme Orsoni. Le texte a paru pour la première fois dans le New Yorker le 28 janvier 2013. © Paige Williams, 2013