Et la transcendance, bordel ?

Petit plaidoyer pour la subjectivité, même cycliste

Et la transcendance, bordel ?

Olivier Haralambon, outre l’expérience des grands cols, a la connaissance des grandes philosophies, et conjuguant savoir et effort, il parvient à faire coexister les critériums et Merleau-Ponty, le braquet et la transcendance, plus inédit, le blaireau et le papier peint des chiottes. “J’ai aimé le cyclisme dans la mesure exacte ou je l’ai détesté”, dit-il. En penseur autant qu’en sportif, l’écrivain sonde le paradoxe.

Maintenant que j’y pense, ma dernière course – mon dernier dossard – remonte à un moment. Il y a, attendez voir, plus de… dix-huit ans, que je me suis décidé à jeter l’éponge. C’était le 16 août 1996, le souvenir reste précis dans ma mémoire. J’avais couru la veille au soir un critérium en bord de Loire. À Gien, tiens. Je m’étais échiné avec les autres, cinquante ou soixante fois la même petite côte, les mêmes freinages et les mêmes virages, cinquante ou soixante passages sur la ligne d’arrivée, dans cette espèce de frénésie tranquille, cette fureur distanciée et sûre d’elle, cette étrange incontinence musculaire que confère l’amphétamine. J’étais maigre comme un clou, je marchais comme une bête. Parce qu’il me revient de le dire, oui : depuis quelques semaines, après dix ans de courses à plein temps, je m’injectais une petite bulle sous la peau de la cuisse avant le départ.