Russie

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Anna la Puttana:post

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Enfant, je n’arrivais pas à imaginer l’état d’âme d’un homme amoureux d’une femme-loutre. Comment se sentait-on face à un amour sans espoir, non en raison d’un refus, mais par la force même de la nature, parce que les choses étaient agencées de telle sorte que personne ne pouvait les changer ? J’éprouvais face à cette femme un sentiment comparable : attiré par elle, mais incapable de l’aimer.

Polygones:post

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Le Kazakhstan est immense : neuvième plus grand pays du monde avec des steppes très peu peuplées. Ce sont les raisons principales, martelées comme des excuses, de l’implantation des polygones dans cette ancienne république soviétique. Au sud de Semipalatinsk, le long du lac Balkhach, la deuxième plus grande étendue d’eau du Kazakhstan, se trouve le polygone de Sary Shagan et son ancienne ville fermée : Priozersk. À l’image d’autres polygones comme celui de Semipalatinsk ou de Baïkonour, le polygone de Sary Shagan s’étend sur des milliers de kilomètres carrés.

Sex Without Pistols:post

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JOUR 2

17 h 11 Audition de Tatiana Anossova, quêteuse. C’est une femme d’un certain âge coiffée d’une tresse couronne, vêtue d’un gilet blanc et d’une jupe.

17 h 32 “Je travaille à la cathédrale du Christ-Sauveur depuis neuf ans…” Anossova est au bord des larmes. “À ce moment-là, j’étais à mon poste, je vendais des bougies à deux paroissiennes. J’ai entendu des cris déchirants. Et là, je vois, sur l’ambon… Je ne pouvais pas laisser l’argent sans surveillance, j’ai demandé aux paroissiennes de garder mon poste, et j’ai couru. Elles étaient là, vêtues de robes multicolores. Elles ont commencé à balancer leurs bras, leurs jambes. Je n’ai pas entendu ce qu’elles criaient, grâce à Dieu. Elles ne m’ont pas simplement injuriée, elles m’ont craché à la figure, elles ont craché sur mon Seigneur !”

17 h 37 Elle continue : “Je ne pouvais pas monter sur l’ambon : je suis une femme. Je me suis tournée vers un groupe de fidèles qui se tenaient contre le mur : ‘Pourquoi restez-vous debout ainsi ! Le Temple est profané !!!’ Deux hommes se sont avancés, puis Vinogradov est arrivé. Une des paroissiennes pleurait, une autre a fait un malaise cardiaque, à une troisième il a fallu donner un anxiolytique. Depuis, je pleure souvent. Personnellement, je manipule de l’argent dans mon travail, et je n’arrive plus à me concentrer pour rendre la monnaie. C’était un acte de haine, un acte hostile dirigé contre nous. Mon âme est meurtrie encore aujourd’ hui, j’aimerais vous la montrer, mon âme.”

Boris:post

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Mon avion s’était posé de nuit, dans une ville vaste où sautaient de petits feux d’artifices : Moscou. Puis la route, le défilé des réverbères, des barres d’immeubles et des hypermarchés cyrillisés – Ашан, Леруа Мерлeн, Икеа – et par le hublot du marchroutka ma nausée naquît : même la nuit, la ville freine et crie ! Une fois rendu, je payais le chauffeur asiate et passais de l’air vicié du dedans à celui vicié du dehors : Moscou : grands tunnels et petits kiosques, Escalators tièdes et mocassins beiges, longues jambes remontant sous des jupes courtes, églises pour touristes impatients d’en sortir, expatriés immodestes et clodos au sourire métallique qui lancent aux plus riches qu’eux : “Elle est contente, la merde ? Oh oui ! Elle a l’air contente !”… De tous les hommes, les Russes sont vraiment les plus étranges et les moins étrangers… Rien n’avait trop changé. Je n’avais donc pas tout à fait raté l’époque qui m’intéressait, et par chance ma nausée semblait bien moindre que celle de cette ville, que le reste du pays ne cherchait même pas à calmer… Moscou – Russie – j’étais perméable à ce pays.