L'Entretien Nº

2

Wang Bing

Le filmeur des marges

Wang Bing

Il se considère comme un symptôme du chaos contemporain. Il veut, à sa manière, en témoigner. C’est le réel qui l’intéresse. Seul, avec une caméra numérique, il filme ce qu’il voit : le crépuscule d’une politique économique, l’exploitation des êtres, les témoins d’un passé qui ne passe pas. D’une radicalité extrême, tant dans sa démarche que dans son esthétique, il filme sans contrôle et ne se donne aucune limite pour la fabrication de ses films, autant pour le temps de tournage que pour leur durée finale après le montage. À chaque film sa temporalité, son rythme, son intensité. Il filme là où ça fait mal : dans les hôpitaux, dans les usines, sur les frontières.

Extrait

Wang Bing, vous êtes né en Chine en 1967, vous êtes auteur de très nombreux films dont certains ont été primés dans des festivals internationaux, depuis À l’ouest des rails, sorti en 2003. Vous avez créé un style, une manière de nous faire découvrir le monde, votre monde. Ça veut dire quoi, être cinéaste ?

W B : Au départ, je ne voulais pas devenir réalisateur, ce n’était pas mon rêve. Au cours de mes études, je me suis orienté vers la photographie, plutôt, et par la suite je me suis rendu compte que c’était très difficile de percer dans cette voie – c’est pourquoi je me suis décidé à tourner mes propres films. Je ne connaissais rien à l’art, personne dans ma famille ne travaillait dans ce domaine. Par la suite, c’est au cours de ma carrière professionnelle, par les amis, que j’ai commencé à m’y intéresser. Et c’est vraiment quand j’ai eu vingt ans que j’ai commencé.

© Franco Origlia