L'Entretien Nº

5

Pierre Bergé

Le lecteur

Extrait

Pierre Bergé et Laure Adler

Qui vous a appris à lire ?

P B      Ma mère, j’imagine… Elle était instructrice. Mais pour ne rien vous cacher, j’ai su les notes, les notes de musique, avant mes lettres et les choses que j’ai vraiment connues c’est la musique. J’étais violoniste. Je vais vous rassurer tout de suite, très mauvais violoniste, mais j’ai quand même joué du violon pendant dix ans, donc je sais de quoi l’on parle. Mais j’ai quand même appris à lire très jeune. Je me souviens d’ailleurs que c’était une merveille, de découvrir que l’on sait lire. De découvrir des objets que l’on ne connaît pas bien, les livres ou les journaux, réservés à d’autres, aux adultes. Tout d’un coup, l’on pouvait se les approprier. Je me souviens très bien du premier vrai livre que j’ai lu, j’avais neuf ans. C’était Dickens, David Copperfield. Pour moi, c’était comme si je rentrais dans le monde des adultes – j’avais neuf ans – parce que je m’appropriais un vrai livre. J’ai bien eu conscience que je m’appropriais un vrai livre, pas un livre destiné aux enfants, mais un vrai livre, que je relis, parfois.

 

Crédit photo : © Yves Forestier /Sygma/ Getty Images