Feuilleton Nº

12

Peur sur la ville


Peur sur la ville

Au Brésil, une équipe de football composée de prisonniers, donne naissance en 1993 à l’un des gangs les plus puissants de la planète : le PCC. Susceptible, comme en 2007, d’immobiliser pendant plusieurs jours une ville de la taille de São Paulo et d’y semer la terreur, la nébuleuse du PCC ne manque pas d’inquiéter l’État, dont elle souligne l’obsolescence. Pour William Langewiesche, la recrudescence de ces déchaînements de violence à l’échelle mondiale excède de loin la simple succession de faits divers.

Extrait

Pendant une semaine en mai 2006, la ville de São Paulo a manqué de se transformer en zone de non-droit, au mépris de l’État et de la nation. Présent aux quatre coins du globe, ce type de zones, à la fois sauvages et densément peuplées, font l’objet d’un déni collectif 
et, par conséquent, sont rarement étudiées. Loin de signifier un retour au Moyen Âge, elles témoignent d’une évolution vers une forme inédite – compagnes de la mondialisation et d’un nouvel ordre qui pourrait à l’avenir rendre obsolètes les frontières nationales. Ce phénomène est déjà visible dans les narco-États que sont la Colombie et le Mexique, le long des lignes de fracture territoriale en Afrique, dans certaines régions du Pakistan et de l’Afghanistan ainsi que dans une bonne partie de l’Irak. Mais il se développe aussi souterrainement dans des pays où l’État semble fort et où le gouvernement a la pleine confiance des citoyens. Le Brésil est l’un de ces pays, et São Paulo n’a rien d’une ville instable. En dépit de sa violence et de ses rues défoncées, il s’agit de la plus grande métropole d’Amérique du Sud. Avec ses vingt millions d’habitants, elle officie comme siège financier et capitale administrative de l’État le plus puissant du Brésil.

City of Fear a été traduit de l’anglais (États-Unis) par Hélène Cohen. Le texte a paru pour la première fois dans Vanity Fair en avril 2007. © William Langewiesche /Vanity Fair, 2007.