Feuilleton Nº

20

Mémo du bureau des affaires intérieures

auteur
Hunter S. Thompson
© Alice Meteignier

Hunter S. Thompson n’est pas du genre à se payer de mots. Pas même quand il s’aventure sur le terrain de la politique américaine. Et encore moins lorsqu’il s’agit d’évoquer Richard Nixon, son ennemi politique, qui, même mort, reste à ses yeux l’incarnation du mal absolu. Car ce dont Nixon est le nom, et que le monde entier se plaît à railler, dépasse de loin selon Hunter le personnage lui-même. Aujourd’hui, l’avènement de Trump ne fait que confirmer la clairvoyance prémonitoire du journaliste…

Extrait

Date : 1er mai 1994
Expéditeur : Dr Hunter S. Thompson
Sujet : Mort de Richard Nixon

Notes sur la disparition d’un monstre américain… C’était un menteur et un démissionnaire et on aurait dû jeter son cadavre à la mer… Mais il était, après tout, président.
“Il cria d’une voix forte en disant : Elle est tombée, elle est tombée, Babylone la grande! Elle est devenue la demeure de démons, un repaire de tout esprit impur, un repaire de tout oiseau impur et odieux.” (Révélation 18 :2.)
Richard Nixon nous a quittés à présent et pour moi c’est une perte. C’était un vrai de vrai – un monstre politique, un digne héritier de Grendel et un ennemi très dangereux. Capable de vous serrer la main et de vous poignarder dans le dos en même temps. Il a menti à ses amis et a trahi la confiance de sa famille. Gerald Ford lui-même, l’infortuné ex-président qui a gracié Nixon et lui a évité la prison, n’était pas protégé contre son nuage radioactif. Ford qui croyait dur comme fer au Ciel et à l’Enfer a annoncé à plus d’un de ses riches et célèbres partenaires de golf : “Je sais que j’irai en enfer, parce que j’ai gracié Richard Nixon.”

“He Was a Crook” de Hunter S. Thompson a été traduit de l’anglais (États-Unis) par Camille de Chevigny.
Le texte a paru pour la première fois dans Rolling Stone en juin 1994, publié ici avec l’autorisation de The Wylie Agency (UK) Limited. © Hunter S. Thompson, 1994.