Feuilleton Nº

18

De mon intérêt pour la non-fiction

Le style de Gay Talese est reconnaissable entre tous. Dandy qui aime se présenter coiffé d’un fedora, il porte une attention tout aussi grande à la confection de ses phrases qu’à celle de ses costumes. À croire ce fils de tailleur calabrais, c’est dans le magasin tenu par ses parents, en écoutant les confidences que les clientes faisaient à sa mère, qu’est née sa vocation d’écrivain, son goût du détail et des bonnes manières. Ainsi, on n’interrompt jamais quelqu’un qui se livre. Prenons acte.

Extrait

Je dois à ma famille et à l’île où j’ai grandi le fait d’être devenu un Américain marginal, un outsider, un étranger dans mon propre pays. Si cela a pu contribuer à freiner mon assimilation
au sein de la majorité silencieuse, cela m’a également entraîné vers ce chemin de traverse, ô combien intéressant, que la plupart de ceux qui souhaitent devenir écrivain connaissent bien.
J’ai des racines italiennes. Je suis le fils d’un tailleur calabrais plein de bonnes manières mais sévère, et d’une mère italo-américaine aimable et entreprenante, qui dirigeait avec
succès le magasin de mode familial. J’ai été éduqué en bon catholique en plein pays protestant par des bonnes soeurs et des curés irlandais, dans une école paroissiale assez pauvre de l’île d’Ocean City, au large de la côte du New Jersey, où je suis né en 1932.

“De mon intérêt pour la non-fiction” est extrait du recueil de portraits et reportages Sinatra a un rhume, traduit de l’anglais (États-Unis) par Michel Cordillot et paru aux éditions du sous-sol en 2014.
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© Éditions du sous-sol, Paris, 2014, pour la traduction française.

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